jeudi 31 octobre 2013

Amour bestial


J’ai rencontré l’homme de ma vie !

C’est mon homme, ma bête, mon animal de compagnie.

Il me fait mener une vie de chien, il me scrute de son œil de lynx, il est moche comme un pou, il a des oursins dans les poches et il dort comme un loir ….mais moi je l’aime !

Quand il bêle des « je t’aime » avec un chat dans la gorge, je fond comme une dinde aux marrons.

J’ai rencontré la femme de ma vie.

Elle a une taille de guêpe et des yeux de biche.

Elle rit comme un vache, elle est jalouse comme une tigresse et a une mémoire d’éléphant.

Elle a une culture d’huitre et une langue de vipère…. C’est une vraie peau de vache mais moi je l’aime.

Quand elle me traite comme un coq en pâte, je rugit de plaisir et quand elle me flatte je me pavane comme un paon….il faut dire qu’ elle est maligne comme un singe !

On est comme qui dirait, le mariage de la carpe et du lapin mais on est heureux.

On va même avoir un petit !

Oh, Il ne cassera surement pas trois pattes à un canard parce que les chiens ne font pas des chats mais, on fera avec, et même, surement qu’on l’aimera…

Et moi, je prendrais bien ce vilain petit canard sauvage pour un enfant du bon Dieu.

Ya pas de lézard !


(C) Pascale DE GERMAY

jeudi 24 octobre 2013

La dame à la licorne


Installée sur un coussin de brocard près de la princesse dont le corps voluptueux charmait les correspondants coréens en visite, la licorne lisait le Coran tant et tant consulté que les pages en étaient cornées.

On entendit au loin une musique dont le son s’amplifia rapidement.

« Riquita, jolie fleur de Java… »s’écria la Princesse dont le regard énamouré fit imaginer des souvenirs brûlants à son entourage, composé, je le rappelle, de correspondants coréens en visite ce jour-là.

« Cornebleu ! » hurla le Prince dont les cornées injectées de sang laissaient deviner que la jouvence de l’Abbé Souris n’était pas son seul réconfort.

« Cornegidouille, tempêta encore le Prince, je ne veux pas d’Yvette Horner et de son diabolique accordéon dans ma demeure !

Il se précipita dans le corridor et on assista alors à un terrible corps à corps :

Yvette Horner habillée par Jean-Paul Gauthier , c'est-à-dire en soutien-gorge aux bonnets pointus de métal blindé contre le Prince dont l’armure commençait à se découper suivant les pointillés...

« Espèce de pécore, enlevez ce corset ridicule où il vous en cuira ! »

« Espèce de Cornecul ! criait Yvette apprenez à respecter mon Art ! »

« vous me revaudrez toutes ces écorchures qui zèbrent mon thorax, répliquait le Prince , fort déçu par la qualité , pourtant made in Germany, de son harnachement.
 « Nulle corrida dans la cour de mon oncle, Alphonse le Corrompu, à l’Escurial ne m’a ainsi blessé et la princesse peut corroborer mes dires ! »
 
La princesse interpellée atténua d’un geste évasif la véracité de cette affirmation.
 
L’aïeul, Don Pérignon, qui cherchait à comprendre de quoi il retournait , trouva enfin son cornet , crut saisir un passage de la diatribe de son gendre :

« encore il dort ? » cria-t-il de sa voix aigrelette.
 
Bousculé par les deux belligérants, son bicorne à peine retenu par un nez proéminent, pendait tristement en lui cachant les yeux . La licorne, toujours charitable, d’un coup de tête adroit le remit en place.
 
Don Pérignon,décillé, vit alors Yvette Horner , la saisit à bras le corps et ils coururent à corps perdus vers la sortie.
 
Les gardes, alors, sonnèrent la charge en soufflant dans leur cor.

Ecumant de rage,le Prince s’élança à la poursuite des deux octogénaires , écartant les gardes , les coréens, la princesse, et sautant par-dessus la licorne.
 
Mais...
 
Il ne faut jamais sauter par-dessus une licorne.


(C) Monique FAUCHER

La ruche


« La mort annoncée »,
 
On n'entend que cette phrase-là à notre sujet depuis plusieurs années. Moi, j'arrive à un point où je me dis 'ça suffit !' Je viens de demander un entretien avec la DRH de la ruche numéro 3, une des quatre ruches qui a encore une dirigeante, notre communauté compte 8 ruches.

La DRH de ma ruche perd son dynamisme, j'ai peut-être plus de chance de me faire entendre par une DRH plus entreprenante. Ma demande est la suivante : comment faire une OPA voire une action plus drastique sur les 4 ruches sans dirigeantes (1,5,6,8). Mais d'abord, je dois persuader la DRH de la 3 de s'allier avec ma DRH et celles des ruches 4 et 7.

Le mot « alliance » ne fait pas partie de son vocabulaire donc je dois peaufiner mes arguments face à ses possibles réticences voire hostilités. Je connais sa soif du pouvoir, l'OPA a des chances de lui plaire, elle pourrait même être en faveur de la destruction totale de ces ruches de moins en moins profitables et cette idée m’irait bien.

J'estime que si nous ne voulons pas seulement survivre mais vivre avec l'espoir d'augmenter nos chaînes de productions partout sur le globe, les ruches non-profitables doivent disparaître le plus tôt possible. Il y a urgence. Je compte sur mes années d'expérience de conseiller dans l'ombre (shadow advisor) des instances les plus hauts placés de notre état pour la persuader de faire la paix avec les DRH de ma ruche (la 2) et des ruches 4 et 7.

J'avais entendu dire qu'elle avait un plan d'action drastique qui consisterait à faire venir de l'étranger des ruches plus petites et plus performantes que les nôtres. Il est vital que je la dissuade de mettre en mouvement ce plan. Nous avons des ressources de grande qualité que nous devons préserver à tout prix ; si les étrangers arrivent sur notre sol ç 'est nous qui ferons l'objet d'un OPA. Les groupes asiatiques sont particulièrement ambitieux et dangereux d'après mes contacts sur place.

Notre apiculteur préféré ne se rend pas compte de ce qui se trame dans ses, non, nos ruches. Son avenir est aussi fragile que le nôtre. Lors de l'entretien avec la DRH de la 2 j'espère trouver un regain de force dans cette période d'instabilité, de grands changements. Nous voudrions à tout prix pouvoir continuer à être les bénéficiaires de ce beau pré de moyenne montagne couvert de bruyère.

 
(C) Primrose DUPIC

Les secrets de la licorne


Un jour, au milieu du désert, une licorne se promène. Elle y est arrivée par hasard, elle ne se souvient plus quand ni comment elle est arrivée là.

Depuis plusieurs jours, elle marche et marche et marche encore. Quand par hasard, elle trouve un accordéon, là, en plein milieu du désert. Elle l’encorne et joue quelques airs.

Alors d’un seul coup, c’est le déclic, elle se souvient du temps où les cornes étaient souveraines, où toutes ces cornes, souvent de couleur sanglante, encornaient les corps laissés à l’abandon.

Le lendemain, l’accordéon toujours dans la corne, elle arrive devant un petit village, petit, très petit, tellement petit que les planisphères les plus détaillés ne se doutent pas de son existence.

Elle avance dans les rues et rencontre, là, comme par hasard, une pécore exposant son corset en plein jour. La licorne en est traumatisée, traumatisée de voir cette espèce de pécore avec son horrible corset, tellement traumatisée qu’elle en tombe raide à cause d’une pierre qui, comme par hasard s’est mise sur son chemin. Elle se redresse difficilement à cause du fichu accordéon encorné dans sa corne souffrante.

Soudain, c’est à nouveau le déclic, elle se souvient de tous ces corps ensanglantés dans les rues à l’époque où les cornes étaient souveraines.

Elle reprend ses esprits et aperçoit une petite écorchure, juste là, au-dessus de son sabot.

Les jours passent et passent, la licorne se retrouve cette fois-ci, comme par hasard, dans une immense ville où la fête est de circonstance.

Elle pense tout bas : « Ouf ! Ici, plus de pécore ! ». Non loin de là, elle entend un orchestre, une banda plus précisément. Elle a envie de l’accompagner avec son accordéon, mais après tant de jours de marche, ce dernier est tellement enfoncé dans la corne, qu’il n’émet plus un seul son ; elle arrive tout de même à l’en extraire, grâce aux soufflets.

Elle continue sa route et tombe sur une magnifique arène où se déroule une corrida. Elle constate que tous les passants ont des cornets à churros et elle souhaite bien évidemment leur en piquer quelques-uns. Tous les spectateurs de la corrida portent, comme symbole de la fête, de magnifiques bicornes de couleurs différentes, un véritable arc-en-ciel.

Quand soudain, c’est encore le déclic pour la licorne, elle se souvient des couleurs de sa ville natale, où toutes les licornes avaient justement un pelage arc-en-ciel. Elle revient à la réalité et voit de loin la banda, qu’elle décide de rejoindre. A ce moment -là, comme par hasard, le musicien jouant du cor fait une terrible chute qui le laisse raide. L’ambulance arrive et tout rentre dans l’ordre, enfin pas tout, il manque maintenant un musicien à la banda. La licorne accourt, folle de joie et remplace le joueur de cor au grand bonheur de la banda.

D’un seul coup, c’est encore et encore le déclic et la licorne se rappelle tout, elle se remémore son appartement au 7ème ciel, elle se souvient qu’elle jouait pour l’orchestre et que tout à coup, il y eut un accident de nuages et qu’elle tomba au beau milieu du désert. Elle se rappelle aussi que les corps n’étaient autres que des cadavres de personnes mortes brutalement.

Les festivités finies, elle rentre chez elle où elle mène à présent une vie paisible et pleine de surprise.

(Les licornes sont peut-être des animaux mythologiques qui font rêver les petites et les grandes filles, mais, dès que le soleil se cache, elles pillent les tombes des plus profonds cimetières, c’est pourquoi les corps ensanglantés sont présents dans leur vie de tous les jours.)


(C) Célia DEVANT-PERROTIN (14 ans)

 

La licorne et la pécore


La licorne est un animal avec une corne sur la tête.

Un jour cette fameuse licorne commence tout bêtement à jouer de l'accordéon.

Puis un autre jour, elle trouve un corps mort dans la nature.

Ensuite elle rencontre une pécore qui ne fait que parler ; la licorne remarque alors que cette fameuse pécore porte un corset et qu’elle présente des écorchures au bras. 

La licorne va voir une corrida avec la pécore et après la corrida une jument leur donne à chacune un magnifique cornet de fleurs. 

Après cela elles vont en chœur s'acheter un bicorne. 

Enfin la licorne décide de jouer aussi du cor.



(C) Salomé DEVANT-PERROTIN (9 ans et demi)

vendredi 18 octobre 2013

Lorsqu'à minuit


Lorsqu'à minuit je saute d'arbre en arbre, je trouve que la vie est étrange...


Me voila sur un chêne.

Tiens, tiens, Mr et Mme Sonders. Je les guette, les épie, les mate et me régale!

Canapé, coussins bleus, napperons , fleurs plastique...

Télévision, ils regardent Drucker...

N'est ce pas étrange??


Mais, vite, suivant! zappons! Sautons!


Me voila sur un bouleau.

Tiens, tiens, Mr et Mme Jacklein.

Dîner... Soupe de clavaire accompagné d'un gigot de torniot sur son lit de sevioles. Association clavaire et gigot de torniot??

N'est ce pas étrange?


Mais, vite, suivant! zappons! Sautons! Volons!


Me voila sur un forsythia. Attention, pas le vulgaire forsythia du japon, mais celui du Liban!

Tiens, tiens, Mr et Mme Dugand.

Il coud, elle lit football magazine...

N'est ce pas étrange?


Mais, vite, suivant! zappons! Sautons! Volons! Bougeons!


Me voila sur un saule.

Tiens, tiens, Mr et Mme Sully.

Lumière à la bougie, scies et couteaux, ombres douteuses...

N est ce pas étrange??


Mais, vite, suivant! zappons! Sautons! Volons! Bougeons! Fuyons!!


Me voila sur un cèdre.

Tiens, tiens, Mr et Mr...

Mr et Mr...??

Mr et Mr..?!!!!

Quand je vous dis que la vie est étrange!!


 
(C) Olivier CHAUVELOT

jeudi 17 octobre 2013

Pablo



Pablo, c'est le nom de mon chat.

Mon chat s'appelle Pablo, oui tout simplement, comme un vrai madrilène, un spécialiste des nuits.

N'allez pas imaginer qu'il fréquente les bars et les ruelles chaudes, non il ne se prend pas pour Hemingway.

Son domaine à lui le nyctalope avisé, c'est plutôt les jardins publics, les parcs, les lieux où dans le charme envoûtant des nuits d'été, les rencontres avec les femelles du quartier enchantent l'existence.

Il n'appartient pas à cette race de chats de canapé, vautrés toute la journée dans les coussins du salon et qui n'hésitent pas à refaire une sieste nocturne après s'être gorgés de croquettes à la crevette.

Non mon chat lui, il est toujours au charbon, heureux d'éprouver sa vitalité et son indépendance, c'est à peine s'il fait une sieste l'après-midi, il a une résistance à toute épreuve.

Parfois il se pose dans la journée assis sur ses pattes arrière, l'oeil mi-clos comme si autour de lui le monde vaquait à des occupations insignifiantes qu'il observe malgré tout d'un œil distant.

C'est son grand moment philosophique, le moment où sa pensée se déploie, il a l'air d'être au-dessus du sol, au-dessus de ces basses contingences. Dans ces moments je l'appelle Adorno ou encore Wittgenstein – il aime les noms compliqués et me répond par un clignement d'oeil.


(C) Daniel MARC