mercredi 1 février 2017

Confession silencieuse



Tout commence par un adieu. Du balcon, sa main sortie de la portière, dernier signe, pâle reflet de notre belle histoire.

C’est tout ce qu’il me reste, pas un adieu, juste l’ombre de son sourire, une graine semée à jamais au fond de ma rétine, une feuille vierge, miroir de mon imaginaire.

« Je te reconnaîtrais entre mille » me disait-il…

Par contre, moi j’ai pu vérifier que de mémoire je ne reconnaîtrais ni sa main, ni ses lèvres, ni ses pieds, ni son sexe.

Dans mes draps humides, j’ai rêvé pendant des mois que l’on me demandait de le reconnaître seulement à la vue de ses doigts ou de ses orteils. Longs, fins, roses ou bruns écrasés ou boudinés. Je ne sais…c’est le néant.

J’aurais préféré que l’on me propose sa voix chaude et appuyée celle qui hante mes oreilles.

Le temps s’est écoulé comme un sablier géant. Année après année, comme un livre ouvert au hasard éternellement à la même page. Comme si le génie des lieux tenait mon corps prisonnier d’une montagne d’obstacles minuscules mais tellement prégnants.

De temps en temps, un éclair de lucidité et je retrouve vie, quelque fois un ciel dégagé rarement un éclair dans l’azur. Il m’a dit au « revoir « jamais « adieu ». J’en ai croisé des pieds…des mains. J’en ai tenté des procédures afin d’éclaircir cet épais mystère. Je suis toujours son esclave vingt ans après cela.

A chaque saison à la période des dernières fleurs d’automne, ma quête s’anime à nouveau et dure l’hiver entier. La thèse du crime a été un moment évoquée, mais aucun élément n’est venu étayer cette hypothèse et ma torture a continué.

Seul mon chat m’a accompagné avec amour et tendresse durant ces années. Les amis ont déserté. Mon corps a cédé sans bruit comme une muraille qui s’effrite en l’absence de soin et d’attention.

Je me disloque en petites particules. Mes rêves sont en lévitation. J’ai beau faire des pieds et des mains. Je ne peux quitter le théâtre de notre conversation ininterrompue.

C’est décidé je déménagerai.



(C) Geneviève BONIFAIT

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